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J’ai changé. Je ne caresse pas encore tels d’autres des ambitions démesurées en me rasant le matin, mais les années aidant j’ai lentement et sûrement appris à apprécier le foisonnement créatif émergeant des coteaux abrupts du hard-prog. À la bonne heure, il s’agit précisément du fond de commerce de Razor Wire Shrine, un power-trio américain dont j’avais déjà eu l’occasion de vous entretenir à la faveur de la sortie de leur premier bébé "Going deaf for a living" (ou "devenir sourd à vie"…) en 2004.
Les frères Rodler (Chris à la guitare et à la basse, et Brett à la batterie) n’ont rien perdu de leur sens de l’humour depuis 5 ans en donnant à leur nouveau rejeton un patronyme pour le moins antéchristique de celui du dernier album de Marillion (pour mémoire, "Happiness is the road") !
"The power of negative thinking" ("le pouvoir de la pensée négative") c’est assez drôle en effet en ces temps politiquement corrects, mais par delà l’étiquette, l’opposition avec la zénitude du dernier opus de Steve Hogarth et sa bande se traduit aussi et surtout dans le contenu du flacon.
En l’occurrence je verrais bien un breuvage façon eau de vie ou tout autre calva de ferme titrant gentiment ses 80°…
J’avais évoqué en 2004 une filiation avec King Crimson. On la retrouve de-ci de-là en 2009 au travers de quelques riffs du troisième membre (occasionnel car de session) de la formation, Mike Ohm. Mais globalement le propos de RWS s’est encore durci en cinq ans, et à présent le parallèle serait plus volontiers à faire avec les albums les plus durs de Dream Theater, pour les parties les moins enlevées uniquement…
Le fait est qu’elles sont rares, et que si Mike Portnoy ne dédaigne pas martyriser sa double-grosse caisse à l’occasion, son utilisation quasi systématique et à longueur de morceaux par Brett Rodler induit assez rapidement une fatigue certaine chez l’auditeur, à tout le moins chez votre humble serviteur.
Comme par ailleurs la ligne mélodique est assurée par des riffs de guitare le plus souvent plombés et/ou agressifs (point de claviers à l’horizon), et que par ailleurs l’album est totalement instrumental (si voix il devait y avoir je pense que des grunts assénés par une montagne de type scandinave colleraient à merveille), l’on comprend que la lecture de cet album est à réserver à la frange de ceux dont l’environnement familial est nettement plus tolérant que la moyenne nationale !
Que l’on ne se méprenne pas pourtant : les musiciens sont techniquement excellents et les compositions ne cèdent en aucune manière à quelque forme de facilité. Mais cette complexité mélodique excessive associée à une agressivité quasi permanente rend l’exercice des écoutes successives sensiblement plus difficile qu’à l’accoutumée avec des albums que nous dirions plus "consensuels".
Au final je conclurai presque de la même manière qu’il y a 5 ans. Les 7 titres de cet album feront plus certainement le bonheur des aficionados du heavy-metal que celui des progueux, fussent-ils sur la voix d’une conversion aux charmes insoupçonnés du rentre-dedans !
A la réflexion je n’ai peut être pas vraiment changé…
Serge Llorente
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