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Habitués de la Classic Rock Society, qui en 2003, leur décerna le titre de meilleur nouveau groupe à la faveur de la sortie de leur premier album "Full scale", Strangefish, quintette originaire de Manchester, reste depuis sa création en 1989 fidèle à une esthétique musicale que nous dirons, pour schématiser, dans veine de l’illustre ancêtre Genesis.
Je n’ai toutefois pas dit que Strangefish se contentait de repomper avec plus ou moins de bonheur des plans entiers aux cinq autres anglais, devenus célèbres depuis grâce à un public qui, souvent d’ailleurs, ne connaît pas ces tous premiers joyaux dont Strangefish s’inspire, mais ceci est une autre histoire et je m’égare !
Non, contrairement à quelques groupes de la péninsule à la botte, Strangefish joue dans l’esprit de Genesis sans les caviarder outrageusement, et c’est ainsi que fin 2005, le combo persiste et signe avec la sortie de leur second opus, "Fortune telling".
Après deux morceaux ("happy as I am"/"it could be me") à l’élégance certaine, bercés par des nappes de mellotron/synthé et des riffs aériens, Strangefish ajoute une pointe (fugace) d’agressivité avec l’intro de "random", sur fond d’un concept album narrant les aventures d’un homme en quête du bonheur, qui croit un instant le trouver après avoir décroché le jackpot au loto ("random" ou "hasard" s’achève par un "and you are the winner !") pour s’apercevoir finalement que les vraies valeur du bonheur sont ailleurs.
Le titre suivant, "360", est introduit au violon qu'à ma connaissance, on ne trouve pas dans Genesis, et qui ferait plutôt penser à un passage d’une œuvre de Fabio Zufanti ! Plus sérieusement et définitivement, Strangefish joue dans l’esprit Genesien, c'est-à-dire en usant de plans sophistiqués mais agréables, en ayant recours à des sonorités de guitare, de claviers et une rythmique qui évoque l’esprit du prog des années 70, mais il s’agit bien d’une œuvre originale à laquelle la voix de Steve Taylor, primé également en 2003 par la CRS dans la catégorie meilleur chanteur, apporte un supplément notoire de raffinement et de chaleur humaine, sur tous les morceaux.
"Fortune telling" n’est pas un concept album au rabais, ses divers titres constitutifs ayant réellement été composés dans l’esprit du tout. Si chacun conserve dans une certaine mesure sa personnalité intrinsèque, les enchaînements sont habiles et assurent une unité de bon aloi à l’ensemble de l’œuvre, à l’exception sans doute du sixième morceau, "have you seen the light", dont la rythmique binaire et les arrangements plus «modernes» me semblent en décalage avec le reste de l’album ; tout se passe comme si on avait placé au milieu de "Selling England", une résurgence de "mama" !
Que du bon dans les cinq titres qui suivent, on reprend le rythme et la couleur des passages précédents, "reflection" nous rappelant fortement IQ (même la voix de Steve ressemble à celle de Nichols sur ce titre). L’album s’achève par une gigue endiablée de Julian Gregory au violon (quand il n’officie pas à la basse), aux côtés du reste de la formation, soit Bob "tout court" à la guitare, Paul O’neill aux claviers et Dave Whittaker à la batterie.
Forcément, Strangefish ne révolutionne pas le genre, mais cela ne signifie pas que le groupe ne puisse se prévaloir d’un talent certain ni leur album être digne d’intérêt. C’est même tout le contraire, "Fortune telling" apportant dans le style musical choisi par le groupe (il y a pire…) des tas d’idées intéressantes, et une touche générale de modernité «maîtrisée» que pour ma part, je trouve de très bon aloi. En d’autres termes, "Fortune telling" n’est ni du néo-prog ni du prog repompé 70’s, mais quelque chose entre les deux. Un groupe qui, très probablement, vaut le détour sur scène.
Serge Llorente
Extraits, infos et commande sur www.strangefish.co.uk
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