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Petit rappel des faits :
En 2001, Adagio, un groupe international fondé par le guitariste français Stéphan Forté, et composé du bassiste français Franck Hermanny, du chanteur anglais David Readman, du batteur allemand Dirk Bruinenberg et du clavier suédois Richard Andersson, propose son premier album "Sanctus ignis". Cette première carte de visite propose un métal racé dans la droite ligne musicale de leur maison de disque d’alors. Un parfait mixage d’influences directes (ou indirectes) allant de Pink Cream 69 à Symphony X en passant par Yngwie Malmsteen, en somme, du métal type neo-classique presque habituel.
Fin septembre 2003 sort leur second album "Underworld". Et là, c’est pour moi le choc ! En effet, je savais que Richard Andersson (ex-Majestic) était parti faire ses glissades de claviers ailleurs (Space Odyssey, Time Requiem entre autres) mais le nom de son remplaçant m’était totalement inconnu : Kevin Codfert ! Ma surprise initiale vient en fait de lui : jamais un groupe n’avait aussi bien su intégrer de telles sonorités de piano classique au métal.
Non seulement les influences du premier album étaient complètement digérées mais elles étaient même dépassées !
Nous sommes aujourd’hui en 2006 et arrive donc le très attendu 3ème album studio avec déjà le 3ème changement de personnel ! En effet, voici que David Readman laisse son micro à Gus Monsanto, un brésilien à l’organe vocal impressionnant mais totalement inconnu dans nos contrés. Autant les départs d’un clavier ou d’un batteur nuisent rarement au rendu des compositions (toujours signées du guitariste Stéphan Forté), autant un changement de chanteur peut décontenancer les fans de la première heure. Je vous rassure tout de suite : Gus a quasiment la même tessiture vocale que son prédécesseur (avec un zeste de Bruce Dickinson en plus) ! En attendant, qu’en est-il de ce nouvel opus ? Dès le premier titre "fire forever", Adagio met le feu ! Un morceau speed pour ouvrir cet album avec un solo comme Stéphan les aime, c’est à dire rapide et surtout mélodique dans le genre malmsteenien mais en plus travaillé ! J’ai néanmoins une petite angoisse : je ne reconnais pas le son typique d’Adagio, c’est à dire le piano classique de Kevin. Ouf ! Je suis rassuré, le voici dès le deuxième titre (qui donne son nom à l’album. Une intro digne d’une musique de film, et encore un titre d’une vélocité étonnante puis vient la surprise : une voix death (celle de Stéphan !) s’immisce dans le lointain puis vers les 2/3 du morceau juste avant les soli, le chant devient carrément d’outre-tombe ! Certes, on reconnaît toujours la patte Adagio avec ce son si caractéristique, mais il y a ce petit plus (ou ce petit moins si on n’aime pas les voix gutturales). "Terror jungle" confirme que cet album est plus dur, plus heavy, plus extrême, et bien plus sombre que les précédents. D’ailleurs tous les autres titres le certifient : "children of the dead lake" (à écouter en priorité rien que pour son pont de piano très concerto classique puis son solo de guitare doublé en tierce ou quarte sur une dentelle de basse tricotée de main de maître par Franck), "r’lyeh the dead" (son intro digne des plus grands films d’Hitchcock ! – j’ai l’impression de voir la scène de la douche dans "Psychose" en imaginant chaque coup d’archet de violon en autant de coup de couteau), "the darkitecht" (avec encore un climat genre "Seigneur des anneaux"), "kissing the crow" (la respiration de l’album : juste un piano, une voix claire voire angélique et quelques violons), "undying" (le bonus track japonais, nullement bouche-trou et qui rappelle l’atmosphère de l’album précédent).
Bien que dans "Dominate" je retrouve tous les ingrédients que j’adore chez Adagio, j’avoue avoir plus de mal avec la voix typée death dans certains passages. Je pense que cette façon d’utiliser une voix humaine paraîtra complètement démodée dans quelques années, de la même manière que l’utilisation des batteries électroniques à la fin des années 70 ou des synthés genre gadget du début des années 80 nous apparaît médiocrement datée et rend ces musiques pratiquement inécoutables aujourd’hui. Enfin, si la double croche (double grosse caisse et doublement du temps) employée à bon escient peut engendrer de fantastiques effets musicaux, je regrette son emploi systématique dans toutes les chansons (sauf sur "kissing the crow"), les rendant trop épileptiques à mon goût.
Ces petits reproches mis à part (et qui ne relèvent que de mes goûts personnels), ce nouvel album restera pendant quelques années encore un bijou inégalable en capacité d’invention, de composition, de technique, de pureté du son. D’ailleurs, nos confrères chroniqueurs musicaux du monde entier lui donnent tous une note comprise entre 8 et 9 sur 10 ou 83 et 85 sur 100. Et si ça, ce n’est pas un bon présage… ?
Gilles Masson
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