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Né des cendres du défunt ADN, Eye To Eye est le groupe fondé par Didier Pègues (batterie, claviers) et Philippe Bénabès (claviers), avec Amirouche Ali Benali (guitares), Benoît Derat (chant) et Cécile Carretero (basse). Le quintet, secondé par quelques invités (le frangin Bruno Pègues pour quelques guitares, Elise Bruckert au violon sur la longue suite finale, Lucie Lemauff aux ch?urs) n'a pas lésiné sur la quantité, puisque cet enregistrement dure pas moins de 66 minutes, réparties sur 9 morceaux. Tout ici est enchaîné, et comme trois morceaux sont de courts interludes (trois très belles vignettes mélancoliques pour claviers écrites par Didier Pègues qui avec Philippe Bénabès compose une grande partie de cet album), on se retrouve avec surtout des morceaux longs, dont deux dépassent les 16 minutes.
Musicalement, Eye to Eye est de toute évidence le fruit de musiciens marqués par Pink Floyd (celui de "Wish you were here" et "Dark side of the moon", en particulier), Genesis et Marillion (peut-être plutôt celui des débuts, d'ailleurs). Il s'agit bien de références car le groupe possède sa propre personnalité, un mélange de lyrisme et de drame, tant sur le plan instrumental que vocal.
Eye to Eye privilégie des mélodies instrumentales fortes, où brillent particulièrement une guitare électrique superbement inspirée (digne de David Gilmour et de Steve Rothery dans leurs meilleurs moments). Les claviers ne sont pas en reste pour autant : les sonorités sont très variées, des plus traditionnelles (un piano assez présent, orgue, mellotron, minimoog) aux plus modernes avec des textures magnifiques et cristallines ou plus orchestrales et ceux-ci interviennent également en solo. Le tout est soutenu par une section rythmique subtile mais qui sait aussi "déménager" quand il le faut.
Le chant est en anglais, plutôt bien maîtrisé dans l'ensemble, même si on sent bien que l'anglais n'est pas la langue natale de Benoît Derat. Celui-ci possède une voix essentiellement claire et médium, particulièrement expressive. Il me semble plus à l'aise dans un registre calme ; un peu de réverbe aurait peut-être donné plus d'impact aux moments plus dramatiques où son timbre se fait plus rageur. Ceci dit, sa performance est particulièrement bonne sur un titre mélancolique, lent et aérien : "you", très facile à retenir.
On note dans l'ensemble une reprise, nettement réarrangée et presque méconnaissable de Ayreon : "back to planet earth" (de "Actual fantasy"), qu'Arjen Lucassen lui-même a apparemment bien appréciée ! Il faut dire que l'ombre du Floyd, si chère à son c?ur et à celui des musiciens de Eye to Eye, plane au-dessus de cette belle version !
"One in a crowd" est un album qui s'apprécie un peu plus à chaque écoute, plein de surprises instrumentales (que de sections sur les suites "love and pain" et "one day?"!), à l'atmosphère souvent mélancolique, où se côtoient des moments intimistes (quelquefois acoustiques) plein de charme et de grandes envolées lyriques très prenantes, des thèmes majestueux qui s'impriment vite dans la mémoire de l'auditeur, plus quelques sections plus tendues, voire pesantes (sur "private fears", par exemple). Même si quelques transitions (rarement) sont un peu abruptes ou par trop inattendues (un petit passage presque funk sur "love and pain", par exemple), l'album est remarquablement bien conçu, plein de sensibilité.
Et en plus, les photos du livret sont superbes? Définitivement un album à écouter attentivement, éventuellement au casque pour bien se mettre dans l'ambiance et en découvrir toutes les nuances, sans parler des divers effets sonores qui le parsèment. Maintenant, on aimerait bien les voir sur scène, évidemment !
Marc Moingeon
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