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Quelle excellente surprise que ce groupe péruvien basé à Lima !
Constitué à la fin des années 90 sous l'impulsion du guitariste Alonso Herrera et du bassiste Alejandro Jarrin ce jeune groupe a déjà tout d'un grand.
Signant ici leur troisième album, ces gens-là ne chôment pas entre composition et concerts, et le résultat s'entend. Quelle maturité !
D'album en album le groupe n'a cessé de consolider sa pratique instrumentale et de se peaufiner un style particulier, tout en sachant chaque fois évoluer au gré de son inspiration. Et les musiciens de Flor De Loto n'en manquent pas, à entendre cette musique qui devient si rapidement évidente et familière.
Si on voulait décrire succinctement leur style, le terme groupé de folk-rock leur convient à merveille. Ce style hybride fut en premier rattaché à leurs ainés de Jethro Tull, et le rapprochement est inévitable du simple fait de l'usage permanent de flûtes aux sons variés. Mais loin de renier ses origines andines, ce qui confère à Flor De Loto sa personnalité si immédiatement attachante est l'apport du folklore de sa région, ainsi que l'aisance avec laquelle celui-ci est intégré dans un univers frôlant tout de même de très près le hard prog.
Cela ressemble quelquefois à Cast (autre groupe de ce quartier du monde faisant un grand usage de flûte), image renforcée par l'apport du chant espagnol. Le chant justement est ici clairement non prépondérant, et néanmoins parfait, quoique typique de ce qu'on attend d'un groupe sud-américain. La section rythmique est nettement mieux mise en valeur que chez les Mexicains, aucun clavier ne venant noyer l'espace sonore.
Beaucoup de passages à la flûte m'ont fait fortement songer à Solaris (sans claviers) et plus particulièrement Musical Witchcraft, groupe de leur flûtiste Attila Kollar. Les amateurs reconnaîtront et devraient apprécier.
Dans les moments les plus enlevés, le côté extrêmement entraînant des airs renvoie quant à lui vers Mago De Oz, autre groupe classé folk-prog tendance musclée. Mais on évite ici le chanteur hurleur de ceux-ci.
Etrangement le poste de flûtiste, si crucial à leur identité, a constamment changé entre les albums, son titulaire actuel étant Junior Pacora.
Ce troisième album, "Mundos bizarros", voit de manière presque contradictoire le contraste entre ses 2 extrêmes s'accentuer : son versant hard devenant plus énergique, acéré et sombre, tout en conservant une fluidité évidente dépourvue d'agressivité, et ses éléments folkloriques porteurs de douceur, assumant de plus en plus leur spécificité, s'offrant des moments copieux sans jamais lasser. Contre toute attente l'équilibre trouvé, en faveur du premier tout de même ce qui n'est pas pour me déplaire, me semble idéal, ce qui est renforcé par l'ordre des morceaux. C'est là que le qualificatif de talentueux si souvent exagéré s'impose.
Notons aussi le superbe travail du bassiste qui, loin de rester en retrait, sait se faire remarquer, souvent pour assurer des transitions, renvoyant dans ces moments aux fusionnistes surdoués de Spaced Out.
Ce qui ne gâte rien, les pochettes aux très belles illustrations d'un surréalisme poétique leur confèrent une identité propre comme le faisaient il y a longtemps les italiens de Le Orme par exemple.
Si vous trouvez que Cast se répète un peu et ne parvient pas toujours à produire une musique lisible dans un fouillis d'idées créatrices, si Solaris vous manque, ou si vous voulez entendre un Mago De Oz plus subtil mais tout aussi enjoué, tentez votre chance avec ces formidables Péruviens qui mêlent tous ces ingrédients et plus encore.
Michael Fligny
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