(846 mots dans ce texte ) - lu : 863 Fois
Pour la première rencontre avec son groupe en DVD, Roine Stolt a souhaité mettre les petits plats dans les grands. Aidé en cela par un label qui sait se donner les moyens de son ambition, déclinant les produits dans des emballages toujours plus attractifs : outre les versions double-DVD et double-CD, un somptueux digibook grand format renfermant les 4 rondelles nous est proposé ( avec quelques clichés crédités à notre photographe en chef Serge Llorente ). Avant tout c’est dans sa réalisation que notre maître d’œuvre a décidé de porter son attention. Une démarche qui, comme nous allons le voir, vise la perfection formelle, perdant au passage toute spontanéité et énergie. Certainement conscient de la difficulté qu’il éprouve à délivrer avec ce groupe une performance irréprochable sur le plan de l’interprétation tout en conservant un rapport étroit avec son public, celui-ci a choisi la solution de facilité : filmer et enregistrer le groupe alors que celui-ci exécute le répertoire dans des conditions de "faux live". La recette est claire : louer une salle de spectacles, en l’occurrence un petit théâtre d’Uppsala, histoire de rester tranquillement à domicile afin de tout contrôler plus facilement. Prendre le temps d’installer tout le matériel pour un fonctionne-ment optimal, autant pour l’enregistrement audio que pour les prises de vues. Et là il faut bien dire que la production n’a pas lésiné : installation d’un rail tout le long de l’avant-scène afin de disposer d’un travelling pour les plans serrés sur chaque musicien, montage d’une caméra sur grue de type "louma" pour les plans aériens en plongée du meilleur effet. Employer quelques caméras supplémentaires en plan large pour les raccords et vues d’ensemble de la scène ; le tout en standard broadcast, ceci afin d’obtenir la meilleure qualité d’image possible. Puis à l’issue de balances et autres réglages minutieux, convier un public spécialement recruté pour l’événement, notamment par le biais du site web officiel. Enfin, lui jouer une set-list constituée exclusivement de longs épiques, quasi identique à celle du dernier passage à Paris et ne surtout pas hésiter à prendre le temps de recommencer le titre si la prise n’est pas bonne et ce jusqu’à la quasi-perfection : voilà un concert qui a dû être long !
Certes, si le résultat en terme de qualité à tous niveaux est surprenant, où sont passées l’énergie, la fraîcheur et pire l’honnêteté que l’on est en droit d’attendre d’une prestation live ? Je n’ai bien évidemment pas la certitude de ce que j’avance mais c’est en tout cas ce que l’on ressent clairement en visionnant (et écoutant) ce DVD à l’image parfaite, à la lumière savamment étudiée et au son plus qu’extraordinaire (…de là à douter que cela ait pu être retouché en studio !). A aucun moment on ne voit l’assistance, tellement discrète qu’elle se manifeste seulement entre les morceaux pour des applaudissements trahissant son faible nombre. Autre indice : les morceaux ne sont pas enchaînés mais entrecoupés des bonus, forts dispensables au passage, du DVD : ceux-ci consistent en de petits reportages sans grand intérêt de Stolt, caméscope au poing, sur les tournées et le studio. Sauf pour les sessions d’enregistrement de la batterie qui nous permettent de nous délecter du fantastique jeu du jeune Zoltan Csorz. Sur scène, à l’exception du poseur de service Hasse Froberg, parfois pathétique et rigolo malgré lui mais dans une forme vocale resplendissante et de l’excentrique percussionniste Hasse Bruniusson dont la présence pour la circonstance s’avère salutaire tant il apporte vie et fantaisie au tout ; les autres musiciens font preuve d’un statisme effrayant, paraissant extrêmement concentrés voire coincés pour certains. Par exemple à l’entame du tout premier morceau "the truth will set you free", on peut presque palper la pression qui s’exerce sur leurs épaules. C’est bien évidemment le cas de Solt, fidèle à lui même, bien que dispensant une prestation guitaristique très inspirée. C’est plus étonnant de la part de Bodin, lésé au montage dans la deuxième partie du set où il n’apparaît quasiment plus, pourtant réputé pour sa décontraction et ses facéties. Ca l’est encore plus pour Reingold, dont l’attitude est complètement méconnaissable, tant il s’applique lui aussi sur son instrument. Heureusement, un relâchement se produit au cœur de la monumentale suite "garden of dreams" et se prolonge pour un "humanizzimo" presque anthologique et qui permet d’apprécier les talents vocaux (et de guitariste-percussionniste) de Daniel Gildenlow, le leader de Pain Of Salvation, venu prêter main forte aux Flower Kings comme pour la tournée qui a précédé.
Bien que "Meet the Flower Kings" reste un document à la qualité technique inégalée ,on aurait été en droit d’attendre d’un tel produit un mixage en 5.1, alors que seule la version stéréo est disponible. Pour ce qui est de la sueur, il faudra également repasser mais là, on s’y attendait un peu. Alors ne gâchons pas notre bonheur en nous délectant dans des conditions quasi-idéales du témoignage vivant d’un des plus beaux fleurons du prog actuel… euh...en studio ?
Eric Verdin
Temps : 0.0426 seconde(s)